"(...) le prolétariat mondial, le prolétariat de chaque pays, abordent une étape décisive de leur histoire : il leur faut reconstruire entièrement leur propre mouvement. La crise du stalinisme (...) s'ampliie au moment où le mode de production capitaliste pourrissant s'avance vers des convulsions mortelles, qui riquent d'entrainer l'humanité toute entière dans la barbarie. (...) De cette crise des appareils naissent les possibilités de reconstruire la IV° Internationale." |
Défense du trotskysme (2)
L'Impérialisme, la bureaucratie du Kremlin, les États-Unis Socialistes d'Europe
Mandel veut en venir à la question suivante :
“ Mais les entreprises soviétiques sont‑elles des propriétaires individuels des moyens de production ? D'où tiennent‑elles ses moyens de production ? Peut‑il y avoir marché, c'est‑à‑dire vente et achat, c'est‑à‑dire échange, quand il n'y a pas de changement de propriétaire ? Voilà un aspect fondamental de la question. Pour autant qu'on croit qu'il y a effectivement propriété étatique des moyens de production industriels, il n'y a pas plus vente de machines d'une entreprise à l'autre qu'il n'y a vente lorsque les moteurs Volskwagen passent dans un autre département du trust pour être assemblés avec des carrosseries. Il est évident que dans une société dans laquelle il y a un large (sic) secteur d'économie de marché, du fait que les biens de consommation restent marchandises, dans laquelle le salaire est une catégorie marchande, est généralisé, que dans une telle économie on soit obligé de faire de la comptabilité sous une forme monétaire même dans les entreprises qui produisent de grands (sic) (pour “ les petits ” c'est sans doute autre chose ? ) moyens de production ” (“ Les problèmes de la planification socialiste ” (tables rondes des) Cahiers du Centre d'études socialistes, N° 82 à 87, page 122).
Mandel éclaire de toute sa science l'économie de l'U.R.S.S., grâce à Volskwagen ! Mais Volskwagen en sait plus, apparemment, sur la loi de la valeur que lui. Pour vendre des automobiles, il sait que les moteurs doivent avoir tel ou tel prix, que le dernier boulon doit également avoir un prix déterminé, qu'à tous les stades, que dans chaque opération parcellaire, ce qui commande, c'est la loi de la valeur, que chaque élément de la marchandise est lui‑même marchandise, sans que l'élément change pour autant de propriétaire, avant de s'intégrer à la marchandise dont il est une composante. Si Volskwagen appliquait “ les lois de Mandel ” à la fabrication de ses modèles... Fiat se réjouirait : en peu de temps il conquerrait le marché allemand. Après tout, peut‑être Mandel entend‑il concourir subtilement à “ l'interpénétration ” des capitaux européens au profit de Fiat ? Cependant, si les matières premières, les moyens de production, circulent d'une entreprise d'Etat à l'autre, et qu'il faille qu'une “ comptabilité monétaire ” rende compte de cette circulation, cela exprime le fait que la loi de la valeur ne peut être envoyée au diable ainsi qu'en avait décrété Staline au cours des années 1929‑30. Mandel qui, décidément, accumule les bourdes, affirme :
“ Ce n'est pas du tout vrai que la loi de la valeur est la seule forme sous laquelle on peut, de manière permanente et objective, comptabiliser le travail social. On peut le comptabiliser de diverses autres manières : on peut notamment le comptabiliser directement en heures de travail (ce qui ne signifie évidemment pas que cette comptabilité doit s'exprimer en heures de travail ; elle peut s'exprimer grâce à divers étalon de mesures, y compris monétaires. ”) (Idem page 120).
Ainsi, que “ la comptabilité ” du travail social s'effectue en heures de travail ou grâce à divers étalons ” (lesquels ? ) y compris monétaires, est indifférent !
Question de choix, rien de plus, déclare Mandel. D'ailleurs, s'est avisé le “ génial économiste ” :
“ il y a une différence fondamentale entre monnaie de compte et une monnaie moyen d'échange, et la seconde ne résulte pas automatiquement de l'existence de la première ” (page 15).
En effet, c'est la première qui résulte de la seconde. L'argent surgit de l'échange des marchandises comme leur équivalent général. Ultérieurement se créée une monnaie de compte, en référence à l'équivalent général, capable d'exprimer la valeur des marchandises en raison de sa valeur propre.
L'exigence d'une comptabilité monétaire manifeste la permanence de la loi de la valeur. La comptabilité en heures de travail démontrerait la libération de l'emprise de la loi de la valeur. La production des moyens de production est inséparable de l'ensemble de la production sociale, qui reste une production marchande en U.R.S.S. et dans les pays de l'Est de l'Europe ; c'est pourquoi s'impose la comptabilité monétaire. Mandel marche à fond dans la fable stalinienne des “ secteurs indépendants ” de la production (production des moyens de production, production des moyens de consommation, production industrielle et agricole) au contraire de Trotsky qui mettait l'accent sur un développement proportionnel et harmonieux des différents secteurs de la production. Et “ l'économiste ” Mandel a, une fois de plus, oublié que la force de travail vivante est la force productive essentielle, sans laquelle les moyens de production naturels ne pourraient être utilisés, sans laquelle n'existeraient pas de machines, sans laquelle aucun autre moyen de production ne pourrait être mis en action. Or le travailleur individuel la vend à sa valeur contre un salaire. Il ne s'agit pas d'une simple répartition, selon son travail des moyens de consommation, mais d'un paiement en valeur. La forme monétaire n'est pas une simple forme de comptabilité sociale, elle a un contenu : la valeur. Elle se définit en rapport avec l'unité de valeur : le rouble. L'instabilité de l'unité de valeur complique considérablement la planification, en même temps qu'elle témoigne de ses déséquilibres. Que par le truchement de l'Etat ouvrier, le prolétariat soit propriétaire des principaux moyens de production, de la terre, des moyens de production sous leurs différentes formes, y compris sous celle de la force de travail collective, et que chaque travailleur soit obligé de vendre sa force de travail individuelle, est sans aucun doute la plus criante des contradictions. La vente de la force de travail comme une marchandise, qui caractérise le mode de production capitaliste forme la plus développée de la production marchande, se maintient, mais en raison de l'appropriation par l'Etat ouvrier des principaux moyens de production et d'échange; la plus‑value n'existe plus ; le moteur de la production cesse d'être la plus‑value et devient la satisfaction des besoins sociaux. Elle ne fait qu'exprimer la contradiction de la période de transition. L'U.R.S.S., les pays de l'Est de l'Europe, la Chine sont encore loin d'être la société dont parle Marx dans la “ Critique du Programme de Gotha ” où pourtant, dit‑il, le mode de répartition bourgeois se maintiendra nécessairement pendant un temps.