1943 |
Source: La Vérité, n°44-45, 20 mai 1943. Reproduit à partir du site radar.org. |
IV° Internationale
Déportations en Haute-Silésie
Mai 1943
Dans le camp de concentration d'Auschwitz (Haute-Silésie) se trouvent 10 000 hommes (Polonais, Ukrainiens, Russes, Juifs, 3 000 allemands condamnés et déportée de toute l’Europe, entre autres Français, 1 200 Juifs des premiers convois de Drancy et de Compiègne, quelques centaines d'internés de Pithiviers et Beaune-la-Rolande, des femmes du premier convoi de Drancv et des femmes originaires de Pologne et d'Ukraine).
Ils sont logés dans des casernes en béton. Dans chaque salle, 300 hommes ou femmes. Un lit pour 7 où la paille n'est jamais changée. Ils sont couverts de vermine. Ils dorment dans les vêtements qu'ils portent le jour. Faute de place pour s'allonger, ils passent les nuits assis sur les lits. Les salles ne sont pas chauffées. Ils sont habillés comme des bagnards et portent un numéro matricule sur la capote et la casquette. Ils ont des bottes, mais n'ayant pas de chaussettes, ils s'enveloppent les pieds de guenilles et de papiers. Ils ont un numéro matricule sur la poitrine nue, marqué à la peinture.
Une gamelle d'eau chaude le matin pour 7 personnes (pas de fourchette ni de cuiller). À midi, la soupe au rutabagas. Le soir, au retour. vers 10 h, ils reçoivent (illisible) gr. de pain avec un peu de margarine, une gamelle d'eau chaude pour 7 personnes. Ils ont droit aux cigarettes. On n'éclaire la salle qu'au moment de la distribution de la nourriture . La cuisine est faite par les internés de nationalité allemande (qui sont privilégiés).
Ils sont réveillés à 3h du matin pour aller travailler. Tous sans exception, malades ou infirmes, travaillent loin des camps, à la démolition des villes d'Auschwitz et de Bilwitz, pour construire des usines gigantesques. Les internés sont transportés au travail dans des wagons à bestiaux (100 à 150 dans un wagon). Le travail est très dur, ils travaillent avec des civils, des ouvriers volontaires de France, en majeure partie. Il est interdit, sous peine de sanctions sévères, de rentrer en contact avec les ouvriers civils : malgré cela les internés parviennent à échanger de la nourriture contre les cigarettes. Les femmes travaillent sur le même chantier mais séparées des hommes. Elles sont gardées par des soldats avec des chiens pour empêcher toute tentative d'évasion. Elles travaillent 14h par jour.
Faute de moyens de transport suffisants, les internés rentrent au camp les derniers vers 20-21h et restent à attendre à la gare des heures entières. Le travail est sans interruption. Un dimanche par mois est férié et employé à la corvée du camp. Ce jour, les internés sont passés en revue par les officiers allemands responsables du camp.
2 WC par bâtiment, pour 1.500 personnes, 10 lavabos pour 800 personnes, 10 douches dans le camp, théoriquement une par mois et par interné. Pas de rechange de linge (la personne qui est revenue n'a pas changé de linge pendant 4 mois). Ils sont couverts de poux, poursuivis par les cafards et autre vermine La majorité ont une maladie de peau. Chaque interné a perdu 15 à 20 kg de son poids. Les syncopes et les crises cardiaques sont des phénomènes fréquents. On vaccine contre les épidémies et on stérilise.
Un médecin pour tout le camp, une salle pour les grands malades qui ne peuvent plus travailler et qui restent dans une saleté repoussante. En une heure le médecin reçoit 300 malades. On diminue la ration de nourriture de ceux qui ne sont pas gravement malades pour les obliger à retourner travailler. Dans ces conditions, le mortalité est très grande : 5 à 10 personnes par jour. II y a beaucoup de cas de suicides. Dans le camp se trouve un crématorium.
Les internés sont gardés par de vrais bagnards allemands qui ne sont plus des êtres humains, de vraies brutes sadiques. Sur le chantier, ils sont gardés par des soldats allemands qui sont plus humains. Les punitions sont à l'ordre du jour. Dans certains cas, envois dans les mines de sel et même passage par les armes devant les internés rassemblés.
Pas le droit d'écrire ni de recevoir de lettres, à l'exception des internés allemands. Si les gardiens trouvent un crayon. de sévères punitions s'abattent.
Ces faits sont exacts. Ils vous sont rapportés par un évadé. Lorsqu'il reçut un coup de cravache et fut blessé et couvert de sang, il n'a même pas ou changer de chemise. Pour soulager sa douleur, il s'est fait un pansement avec un morceau arraché de sa chemise trempé dans sa soupe, faute d'eau.
Le moral n'est pas très mauvais, nous a-t-il dit. Les plus forts soutiennent les plus faibles. Tous pensent sans cesse à leur famille, au sort qui leur est réservé, à la revanche révolutionnaire.